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30 octobre 2017 | י חשון התשעח
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Thérèse Zrihen-Dvir, conteuse d’un Maroc disparu

9782343063195rEvoquant le Marrakech de son enfance, Thérèse Zrihen-Dvir, auteur israélienne d’origine marocaine publie son dernier ouvrage, « Derrière les remparts du Mellah de Marrakech » (l’Harmattan), qui est peut-être son livre le plus personnel car dédié à son petit-fils, Guy. 

L’auteur de 60 ans est née à Marrakech et y a vécu jusqu’à l’âge de 17 ans. Elle quittera le Maroc après une courte visite en Israël en 1966 qui avait définitivement changé son opinion sur toutes ses illusions quant à l’Etat juif. « Sa petitesse, fragilité, ses soldats, sa précarité et surtout le défi qu’il représentait en ces années cruciales de son existence, m’avaient fait comprendre que tous les bras y étaient les bienvenus », déclare-t-elle. Aussi, elle rejoindra le pays dans sa bataille pour sa survie lorsque la guerre des six jours éclata.

Son enfance et son adolescence ont été marquées par certains évènements comme l’arrivée des Chleuhs (ainsi étaient nommés les juifs berbères du sud-ouest du Maroc) au Mellah de Marrakech, puis leur Alya, le retour du roi Mohamed V au Maroc, le départ des Français qui débutera avec l’indépendance du Maroc en 1956 et puis l’émigration silencieuse des Juifs du Maroc vers Israël et d’autres pays.

Installée en Israël en 1967, Thérèse Zrihen-Dvir émigrera au Canada dans les années 80, et arrivera enfin de nouveau en Israël. Et pourtant, c’est le Maroc qui semble faire ressortir ses écrits les plus intimes.

Si elle a déjà raconté sa ville de naissance dans « Il était une fois Marrakech la Juive » (l’Harmattan, 2014), écrit une fiction sur un jeune juif marocain prêt à tout pour sauver son frère dans  » La chasse à l’arc en ciel » (l’Harmattan, 2015), ou dépeint une épopée amoureuse dans  » Il sentait bon le sable chaud mon légionnaire » (Société des écrivains, 2014), c’est en conteuse populaire que l’on retrouve Thérèse Zrihen-Dvir. Des petits contes narrés à son petit-fils, Guy, à la demande de la fille de l’auteur qui souhaite conserver et faire perpétuer le riche patrimoine de la Ville Rouge. Aussi, à travers les odeurs, les motifs et les mots d’antan, le lecteur pénètre dans un univers enchanté découvrant ou redécouvrant un monde perdu, celui de la Marrakech juive. Un seul regret, peut-être le manque d’illustrations pour mieux capter les couleurs des descriptions de la ville natale de l’écrivain. « J’y ai pensé honnêtement. Toutefois, la variété des récits m’a contrainte à m’abstenir de l’illustrer. Par contre dans la version hébraïque de ces contes, j’y ai ajouté quelques images ou petits dessins », précise l’auteur publiée en français, hébreu et anglais.

"Le moribond", illustration figurant dans la version hébraïque des contes, par Eitan Dvir

« Le moribond », illustration figurant dans la version hébraïque des contes, par Eitan Dvir

Les Israéliens aiment voyager au Maroc bien qu’il ne soit tout de même plus celui d’autan. Et pourtant, que ce soit en voyage organisé à la redécouverte de leurs racines ou en période de pèlerinage, des milliers de touristes arrivent dans le pays du couchant lointain et pour Mme Zrihen-Dvir, la raison est toute simple: « Nostalgie - mais surtout ne dit-on pas que l’on idéalise les lieux où nous avons une fois, vécu alors qu’en réalité, ils n’étaient que de simples éléments que nous nimbons inconsciemment d’une auréole de mystère ». C’est ainsi, que l’auteur a su recréer sa ville, et nous invite à y flâner avec ses yeux d’enfant: « Mes souvenirs d’enfance ainsi que le kaléidoscope des cultures que j’ai côtoyé durant cette période m’ont permis de reproduire certains caractères et leur biographie – ou plus précisément leurs aventures et mémoires. »

Nostalgique, Thérèse Zrihen-Dvir l’est indéniablement. Nostalgique d’un Maroc qui a été le moule de son enfance et de son adolescence et qui n’est plus: « Je n’oublierai jamais ses palmiers et ses couchants flamboyants. Je n’oublierai jamais mes retentissantes victoires contre les petits maraudeurs du Mellah, ni les contes, ni les craintes et ni les superstitions. Je le vois toujours derrière l’écran de la rosée du matin. »

Nelly Ben Israël