« No woman’s land » est un roman d’amour, une histoire passionnelle entre une jeune juive franco-israélienne et un Palestinien chrétien. « Il y a des rencontres qui, à un moment donné de la vie, arrivent d’une façon inattendue, la relation passionnelle ayant du mal à s’expliquer rationnellement », commente simplement l’auteur franco-israélienne dans un entretien avec IsraPresse.
Hélène Elter partage son temps entre sa famille, la recherche scientifique et l’enseignement. Installée en Israël, elle a œuvré un certain temps dans le militantisme politique dans les quartiers défavorisés. Titulaire d’un doctorat en Histoire des sciences de l’université hébraïque de Jérusalem, elle présente son premier roman, « No woman’s land » aux Editions L’Harmattan.
Ce qui avait commencé par une nuit d’amour se poursuivra et survivra à la 1ere Intifada, à la guerre du Golfe et se prolongera au-delà de la poignée de mains historique entre Yitzhak Rabin et Yasser Arafat en 1993 lors des Accords d’Oslo. Cependant, malgré un dénouement pratiquement connu à l’avance, les deux héros presqu’antagonistes, Catherine et Christian, ont pourtant beaucoup en commun. L’histoire d’amour débute à Paris au moment de la contestation sociale de mai 68. « La langue française est le terrain commun à ces deux héros », souligne l’auteure. La romance se poursuivra à Jérusalem et dans les Territoires palestiniens, deux lieux tous aussi antagonistes. Autre point commun des protagonistes principaux du roman, cette volonté – consciente ou pas – de transgresser les tabous familiaux et les codes sociaux. Et plus important car cela pourrait expliquer la psychologie des personnages, Mme Elter précise qu' »ils sont tous les deux un peu paumés, l’une après son divorce, l’autre après avoir vécu à Paris ».
On en sait beaucoup plus sur Catherine, la narratrice du roman, que sur Christian qui nous est présenté à travers les yeux tour à tour fascinés, passionnés, ou désespérés de l’héroïne. En filigrane, s’inscrit l’histoire familiale de l’héroïne - la différence d’âge entre ses parents et son rapport à la Shoah car fille d’un père survivant - semblant dessiner les lignes de sa vie. Hélène Elter, ayant terminé elle-même sa maitrise de physique en 1968, explique l’identité juive de son héroïne « par son histoire familiale s’inscrivant dans la mouvance du sionisme de gauche, caractéristique des années 60 », ce qui expliquerait la « fascination » qu’elle ressent en découvrant l’envers du décor israélien. L’envers du décor, c’est lorsque Catherine découvre Ramallah et ses belles villas appartenant à de riches palestiniens mais aussi et surtout ce que lui raconte Christian « [des] tracasseries et [des] vexations que doivent supporter les Palestiniens », sans oublier que son amant méprise les Arabes devenus citoyens Israéliens après la création de l’Etat d’Israël en 1948. Bien que Catherine se définisse idéologiquement de gauche, elle reste parfois « trop sioniste » pour Christian si fier de son peuple qui se soulève lors de la 1ere Intifada. Néanmoins malgré les tensions entre les deux populations et les affrontements inévitables qui provoqueront des séparations entre les amants, ils resteront liés et se retrouveront à chaque fois avec la même émotion.
Hélène Elter offre à ses lecteurs un roman fin et équilibré. Car si la jeune femme bobo de gauche se sent proche de la cause palestinienne, elle est surtout une femme amoureuse et il est difficile de rester indifférent à une histoire d’amour impossible bien que le sujet ait été maintes fois traité en littérature. Il est tout aussi difficile de freiner les passions idéologiques et politiques surtout lorsque cela touche Israéliens et Palestiniens. De plus, la Shoah reste un sujet délicat au sein du peuple juif. Alors que dire d’une romance impossible entre une juive née après la guerre et un Palestinien fervent défenseur des droits de son peuple? Juste que c’est inexplicable mais que cela existe, comme la passion.
Nelly Ben Israël