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30 octobre 2017 | י חשון התשעח
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Claude-Catherine Kiejman : Golda Meir, l’indomptable

Après deux biographies consacrées aussi à des femmes d’exception, « Clara Malraux l’aventureuse » (Arléa, 2008) et « Eléonore Roosevelt : First Lady et rebelle » (Tallandier, 2012), « Golda Meir, une vie pour Israël » (Tallandier, 2015) est le nouvel ouvrage de la biographe Claude- Catherine Kiejman.

Golda Meir, une vie pour Israel (Tallandier, 2015)

Golda Meir, une vie pour Israël (Tallandier, 2015)

Surnommée affectueusement la « Grand-mère d’Israël » par le peuple, Golda Meir est toujours présente dans la mémoire collective. Plus de quarante ans après la mort de « la femme qui a permis à l’Etat juif de voir le jour » selon la formule employée par David Ben Gourion, Claude- Catherine Kiejman lui consacre une biographie qui se lit tantôt comme un roman d’aventures, d’espionnage ou d’amour. De ses jeunes années, l’auteur raconte la terreur des pogroms, la faim, la pauvreté puis l’espoir d’une vie meilleure en Amérique. Mme Kiejman, longtemps journaliste à France Culture, met aussi en avant le rôle de la sœur ainée de Golda, Shana, qui sera son modèle, celle qui lui donnera une conscience politique et sera à la base de son engagement sioniste. Ainsi, le lecteur découvrira l’itinéraire de Golda Meir, qualifiée d' »indomptable » par la biographe, de son arrivée en Palestine mandataire avec son mari Morris à sa démission au lendemain de la guerre de Kippour, sans oublier les missions secrètes qui lui ont été confiées, sa trajectoire politique exceptionnelle qui la conduira au poste de Premier ministre en 1969 à l’âge de 71 ans. Un aspect généralement peu abordé mais que la biographe retrace, ce sont les histoires d’amour de Golda Meir, la femme, qui confiera simplement à Claude Lanzmann en 1970 que l’amour aussi avait une grande place dans sa vie. Sur ses amants et les hommes qu’elle a connus en dehors de son mari Morris, elle se confiera peu, alimentant les rumeurs concernant, entre autres, le banquier arabe Albert Pharaon.

IsraPresse: Consulter des historiens, des spécialistes et des archives est la base de votre travail de biographe, mais entretenez-vous en plus un rapport avec votre sujet?

Claude-Catherine Kiejman: Je ne peux dire si j’aime ou non le personnage, mais je suis impressionnée par son parcours, sa ténacité, son courage à travers le temps et les épreuves. Je suis aussi sensible à une certaine forme d’humour et à son esprit qu’elle manifeste dans plusieurs circonstances comme lors de son ambassade en Union Soviétique, ou lors de ses différends avec les religieux à propos du service des femmes dans l’armée ou face aux Britanniques. Ce qui ne m’empêche pas d’une distance critique vis à vis de son absence de vision ou ses intolérances.

Comment choisit-on sur quoi se focaliser dans une biographie, surtout lorsque l’on a vécu une vie aussi riche et parfois controversée comme Golda?

J’ai cherché à montrer combien ce destin était lié à la grande Histoire. Il ne s’agit pas seulement d’évoquer l’histoire personnelle d’une femme de caractère mais de montrer à quel point elle se forge depuis l’enfance dans le contexte du sionisme socialiste pour déboucher sur la volonté de construire un nouvel État, quelle que soit la multiplicité des obstacles, qu’ils soient régionaux, internationaux aussi bien qu’internes.

Selon vous, pourquoi les Israéliens n’ont pas élu à nouveau une femme à la tête du gouvernement depuis Golda? Pensez-vous que le problème vient de la société ou du côté des candidates?

Israël a changé et ne ressemble certainement pas à ce pays dont a rêvé la pionnière Golda Meir. Quel que soit le jugement que l’on puisse porter sur elle, c’était personnage hors du commun dans une époque exceptionnelle. La société israélienne d’aujourd’hui est autre (par rapport à l’importance donnée à l’argent par exemple), le personnel politique comme dans beaucoup d’autres pays est médiocre, souvent corrompu, et le machisme est loin d’avoir disparu - s’il ne s’est pas renforcé- il n’y a pas non plus sans doute de femme de la trempe de Golda.

Plaque commémorative à l'entrée de sa maison de naissance, Kiev (Ukraine)

Plaque commémorative à l’entrée du lieu de naissance de Golda Meir, Kiev (Ukraine)

En 1998, une plaque commémorative est inaugurée à l’entrée du bâtiment où elle est née à Kiev. Que pensez-vous de cet hommage à Golda, elle qui a vécu une enfance terrorisée par la peur des pogroms?

Le buste de Golda sur la maison de Kiev, cela fait partie des paradoxes de l’histoire. Je ne sais ce que Golda en aurait pensé, tout dépend de ceux qui ont choisi de lui rendre hommage. Sont-ce des Juifs russes, des Israéliens ou des bureaucrates ukrainiens dans un accès de contrition? De toute façon, la recherche des honneurs n’était pas sa priorité.

Propos recueillis par Nelly Ben Israël